Certificats médicaux

Le Conseil reçoit de plus en plus de plaintes de particuliers ou d’employeurs concernant des certificats médicaux pour le moins « maladroits » rédigés pourtant en toute bonne foi par certains médecins. Il nous a donc paru important de vous rappeler certaines règles pour éviter le désagrément d’une convocation au Conseil dans le cadre d’une conciliation et parfois – si la plainte n’est pas retirée – celui encore plus contraignant d’avoir à vous déplacer à la Chambre Disciplinaire de Première Instance d’Occitanie (qui est désormais située à Montpellier…).
Nous attirons votre attention en particulier lors de la rédaction des certificats demandés dans le cadre d’un divorce… l’immixtion dans les affaires de famille - voire le « certificat de complaisance » - est souvent évoquée par la partie adverse…
Le Conseil National de l’Ordre des Médecins déconseille formellement aux médecins de rédiger des certificats médicaux dans ce cadre-là dans la mesure où le médecin ne doit pas s’ériger en juge de la situation ou effectuer un arbitrage – attention à tout certificat qui pourrait ultérieurement être sujet à interprétation tendancieuse. Nous ne pouvons que vous recommander la plus grande prudence dans la rédaction des certificats qui vous sont demandés. N’hésitez pas à vous rapprocher du Conseil (05.63.54.08.86 – sauf le vendredi après-midi et le samedi).
Attention également aux certificats et arrêts de travail pour des patients que vous estimez être en souffrance morale au travail. Sauf cas tout-à-fait exceptionnel, vous ne pouvez affirmer – dans la mesure où vous n’êtes pas présent sur son lieu de travail – qu’il s’agit d’une souffrance morale au travail et encore moins d’un harcèlement moral au travail (qualification pénale). Vous ne pouvez attester que de ce que vous avez personnellement constaté.
N’oubliez donc pas d’indiquer, si vous reprenez des précisions données par votre patient « …allégué par le patient » cette simple précision suffit, ou de mettre ses propos entre guillemets, car dans le cadre d’un conflit au travail il n’est pas rare de voir un certificat ou un arrêt de travail porté à la connaissance de l’employeur dans le cadre du contradictoire, le plus souvent lors d’une procédure devant le Conseil des Prud’hommes. S’en suit toujours un dépôt de plainte à l’encontre du médecin, qui, dans l’empathie qu’il peut ressentir envers certaines situations décrites par son patient - qu’il connait souvent depuis plusieurs années et dont il ne met pas la parole en doute - rédige un certificat en « affirmant » des faits tels que rapportés au lieu de préciser qu’il s’agit des dires du patient.

 

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Les Principes généraux.
1° - l’établissement de certificats médicaux est une des fonctions du médecin. Il ne peut s’y soustraire que pour des raisons précises. Il en a l’obligation pour les certificats exigés par les lois et règlements (accident du travail, application des lois sociales, certificat descriptif de l’état de santé du patient, etc…). Quand ce n’est pas le cas, le médecin apprécie s’il y a lieu ou non de délivrer le certificat qui lui est demandé et rejettera les demandes abusives. N’hésitez jamais là encore, en cas de doute, à vous rapprocher du Conseil départemental de l’ordre.
           
2° - le médecin est libre dans la rédaction du certificat mais celui-ci doit être parfaitement objectif et relater les constatations qu’il a faites. Celui-ci ne doit pas comporter d’omission volontaire qui pourrait dénaturer les faits.
           
3° - un médecin ne doit jamais délivrer un certificat médical sans avoir vu et examiné la personne dont il s’agit. L’établissement d’un certificat est en effet un acte à part entière de l’activité médicale.
4° - le médecin qui rédige un certificat doit se préoccuper de respecter les règles relatives au secret professionnel, bien qu’il puisse en droit tout écrire du moment que le document est remis à l’intéressé (ou à son représentant légal avec l’autorisation du patient pour les mineurs, ou au tuteur avec l’autorisation de l’adulte protégé), sauf si le certificat comporte des renseignements  médicaux ou un diagnostic qui constitueraient une révélation traumatisante pour le patient, ce cas restant cependant tout à fait exceptionnel.
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Les textes de référence.
Article R.4127-28 du Code de la Santé Publique : « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite. »
Article R.4127-50 du Code de la Santé Publique : « Le médecin doit, sans céder à aucune demande abusive, faciliter l’obtention par le patient des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit.
A cette fin, il est autorisé, sauf opposition du patient, à communiquer au médecin-conseil nommément désigné de l’organisme de sécurité sociale dont il dépend, ou à un autre médecin relevant d’un organisme public décidant de l’attribution d’avantages sociaux, les renseignements médicaux strictement indispensables. »
Article R.4127-51 du Code de la Santé Publique : « Le médecin ne doit pas s’immiscer sans raison professionnelle dans les affaires de famille ni dans la vie privée de ses patients. »
Article R.4127-76 du Code de la Santé Publique : « L’exercice de la médecine comporte normalement l’établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu’il est en mesure de faire, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires.
Tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé lisiblement en langue française et daté, permettre l’identification du praticien dont il émane et être signé par lui. Le médecin peut en remettre une traduction au patient dans la langue de celui-ci.
La rédaction d’un certificat médical est un acte engageant directement la responsabilité du médecin tant sur le plan disciplinaire que civil ou pénal ».
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Le Conseil National de l’Ordre conseille au médecin, lorsque le certificat comporte des renseignements confidentiels :
-           d’inscrire sur le certificat “Attestation confidentielle délivrée à M. ou Mme X sur sa demande” ;
-           de faire contresigner le patient. Le médecin gardera un double du certificat contresigné, ce qui prouvera – le cas échéant – que le certificat a bien été remis au patient.

 

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L’établissement de certificats et les dérogations au secret professionnel.

 

Certaines dérogations ont un caractère obligatoire, d’autres permettent aux médecins de faire état des informations qu’ils détiennent sans encourir les sanctions prévues à l’article 226-13 du Code Pénal (concernant l’obligation respect du secret professionnel).

 

Dérogations légales obligatoires :
- déclaration des naissances,
- déclaration des décès,
- déclarations des maladies contagieuses au médecin de l’ARS (liste fixée par voie règlementaire – voir rubrique liste des maladies contagieuses à déclaration obligatoire),
- déclaration des maladies vénériennes,
- certificat d’admission en soins psychiatriques (indication du nom, prénom et symptômes présentés),
- incapables majeurs,
- accidents du travail et maladies professionnelles (certificats détaillés décrivant les lésions et leurs conséquences),
- de fournir à leur demande aux administrations concernées des renseignements concernant les dossiers de pensions militaires et civile d’invalidité ou de retraite,
- certificats à joindre à une demande à la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH),
- de transmettre à la CRCI (Commission Régionale de Conciliation et d’Indemnisation) avec l’accord du patient, les documents qu’il détient sur les victimes d’un dommage (accidents médicaux, VIH, amiante etc…)
- lorsqu’il exerce dans un établissement de santé, de communiquer au médecin responsable de l’information médicale (DIM), les données médicales nominatives nécessaires à l’évaluation de l’activité,
- les certificats de décès,
- de communiquer à l’Institut de veille sanitaire les informations nécessaires à la sécurité, veille et alertes sanitaires.
La loi permet – voire oblige - en outre le médecin à rédiger des certificats afin de signaler :
- des violences dans les cas suivants :
- signalement au Procureur de la République des sévices constatés (physiques, sexuels ou psychiques) subis par des mineurs de moins de 15 ans ou par une personne majeure incapable de se protéger (en raison de son âge, son handicap, les femmes enceintes etc…),
- signalement à la CRIP (Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes) toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l’être,
- signalement au Procureur de la République (sans l’accord de la victime majeure) de violences au sein du couple – uniquement - si deux conditions sont réunies :
1° - lorsque les violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat ;
ET
2° - lorsque la victime se trouve sous l’emprise de l’auteur des violences.
Cette dérogation au secret professionnel fait l’objet d’une autre fiche plus complète sous la rubrique « le secret médical et les violences au sein du couple ».
- de rédiger des certificats médicaux à destination des Médecins Conseils nommément désignés de l’organisme de Sécurité Sociale dont le patient dépend, ou à un autre médecin relevant d’un organisme public décidant de l’attribution d’avantages sociaux, toujours avec l’accord du patient. Cette démarche fait partie de la prise en charge du patient car c’est un devoir pour le médecin d’aider son patient à obtenir les avantages auxquels il peut légitimement prétendre sans toutefois céder aux demandes abusives. (pour rappel : il n’existe aucune dérogation au secret professionnel concernant les mutuelles et compagnies d’assurances).
- à rédiger un certificat signalement de la dangerosité – pour elle-même ou pour autrui – de personnes détenant une arme à feu ou ayant manifesté le désir d’une acquérir une (article 226-14-3 du Code Pénal) pour plus de détails, voir fiche « certificat pour détention d’arme à feu ».
- de rédiger des certificats de santé pour les enfants en bas âge.
- de rédiger des certificats médicaux en matière de coups et blessures involontaires ou en cas de violences et voies de fait volontaires. Bien entendu le médecin doit se garder de toute interprétation et ne décrire que ses constatations médicales. Toute affirmation du patient doit – si le médecin l’estime indispensable – être retranscrite entre guillemets ou en indiquant qu’il s’agit de faits allégués par le patient.
Bien entendu le médecin est autorisé à tout moment à rédiger un certificat de constatation de l’état de santé d’un patient, à sa demande, et toujours sous réserve que ce certificat lui soit remis en main propre (ou à son représentant légal s’il est mineur, ou à son tuteur si le patient bénéficie d’une mesure de sauvegarde de justice.
EN CONCLUSION
La rédaction de certificats médicaux impose la prudence quant aux termes à utiliser. Le médecin ne doit y indiquer que les constatations qu’il a réellement été en mesure d’effectuer. Il ne doit pas céder aux demandes abusives et se garder de toute interprétation.
L’établissement d’un certificat, en règle générale, ne revêt aucun caractère d’urgence ce qui vous laisse le temps de contacter Conseil de l’Ordre (05.63.54.08.86) qui est à votre disposition pour vous conseiller sur le bien-fondé de la demande.


Quels certificats médicaux le médecin doit-il refuser ?

  • Ceux qui reposent sur une demande abusive ou illicite,
  • Ceux qui sont demandés par un tiers, sauf exception prévue par un texte.

Le Conseil National de l’Ordre des Médecins a consigné des conseils bien utiles pour rédiger correctement un certificat médical :

  1. Le rédiger sur papier à en-tête,
  2. S’informer de l’usage du certificat demandé,
  3. Réaliser un interrogatoire et un examen clinique,
  4. Décrire de façon précise et objective les éléments et faits médicaux personnellement constatés (FMPC),
  5. Rapporter, si utile, les dires du patient : au conditionnel et entre guillemets,
  6. Ne pas se prononcer sur les dires du patient ou la responsabilité d’un tiers,
  7. Dater le certificat du jour de sa rédaction même si les faits sont antérieurs,
  8. Se relire, apposer sa signature,
  9. Remettre le certificat au patient lui-même en main propre et le mentionner sur le certificat, jamais à un tiers, sauf exceptions,
  10. Garder un double du certificat,
  11. Savoir dire non aux demandes abusives ou illicites.
  12. Si besoin, se renseigner auprès du conseil de l’Ordre.

Modèle de certificats médicaux